Consultation nationale au Bénin : Vers une gestion durable et sécurisée du complexe W-Arly-Pendjari

Après le Niger et le Burkina Faso, le Bénin a tenu sa consultation nationale dans le cadre de l’initiative visant à soutenir la gestion durable du complexe W-Arly-Pendjari (WAP). Cette rencontre organisée par le CENAGREF, s’est déroulée les 19 et 20 décembre 2024 à Grand-Popo, avec le soutien de partenaires internationaux tels que l\’UNESCO, la Fondation des Savanes Ouest-Africaines (FSOA), l’UICN et la GIZ, et grâce au financement du gouvernement norvégien. L’événement a réuni des acteurs clés de la conservation, des forces de défense, de la sécurité publique, des experts ainsi que des représentants des communautés locales.

Face à la crise sécuritaire persistante au sein du complexe WAP, les trois pays concernés le Bénin, le Burkina Faso et le Niger ont réaffirmé leur engagement à protéger et gérer durablement ce patrimoine naturel commun. Une initiative qui met en avant la coopération transfrontalière renforcée pour répondre aux défis liés à ce site classé au patrimoine mondial.

Au cours des échanges et des travaux de groupe, les participants ont recensé les dispositifs et actions de sécurisation en place, tout en identifiant les risques et lacunes. Ces réflexions ont permis d’élaborer un plan d’action spécifique pour la protection du complexe.

Les participants témoignent

Pendant plusieurs jours d\’intenses activités de réflexion, les acteurs ont pu faire le diagnostics et proposer des solutions nécessaires à la gestion durable et sécurisée du complexe. Sylvestre Djagoun, enseignant-chercheur à l’Université d’Abomey-Calavi et consultant, a salué la qualité des discussions et l’implication des acteurs dans la gestion du complexe WAP.

Pour Bello Abdel Aziz, Directeur du Parc National W au Bénin, les solutions proposées représentent une réponse efficace aux défis de sécurisation du complexe. Il a particulièrement mis en avant la participation active des communautés locales à cette rencontre, tout en soulignant l’importance d’initiatives sociales complémentaires pour renforcer la confiance des populations envers l’État.

À l’issue de cette consultation, Ibrahim Baré Oumarou, Trésorier Général de l’Association Nationale des Organisations Professionnelles des Éleveurs de Ruminants au Bénin, a exprimé son espoir de voir les parcs véritablement renaître et continuer à jouer un rôle crucial dans le développement durable.

Pour Junior Ohouko, de l’Unité Afrique du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO, cette initiative se distingue par son approche inclusive et participative. « Nous collaborons d’abord avec les acteurs responsables de la gestion, notamment le CENAGREF et tous les autres acteurs dans chacun des trois pays. »

A noter que ces consultations nationales des différents pays aboutiront à l’élaboration d’un Plan Régional d’Urgence commun et à l’organisation d’une table ronde des partenaires techniques et financiers.

Megan Valère SOSSOU




Ecocitoyenneté : Sur les pas du colibri, les jeunes s’engagent pour sauver la planète

L’une des leçons les plus inspirantes que l’humanité a reçues en matière d’écocitoyenneté est celle donnée par le colibri, ce petit oiseau des Amériques. En effet, il était une fois un feu de forêt qui fit fuir toute la faune, sauf le plus petit des oiseaux : le colibri. N’écoutant que son courage et sa détermination, celui-ci transporta une goutte d’eau, puis une autre, et encore une autre. D’un air moqueur, le gros ours lui demanda : « Mais qu’est-ce que tu fais là ? », et le colibri de répondre : « Je fais ce que je peux, je fais ma part ».

Le colibri, symbole d’engagement éco citoyen

Cette fable, racontée par les Quechuas, Amérindiens d’Amérique du Sud, prend tout son sens dans le contexte actuel du changement climatique, où des milliards de \ »gouttes d’eau\ », symbolisant des gestes quotidiens, sont nécessaires pour assurer la survie de l’humanité et de la planète. Cela est d’autant plus vrai en Afrique, où les effets du changement climatique sont particulièrement sévères en raison de la vulnérabilité et de la précarité des communautés.

 « Au quotidien, en Afrique, des familles sont déplacées, des familles souffrent de famine, et des conflits éclatent à cause de la lutte pour des ressources devenues de plus en plus rares », a déploré Augustine Njamnshi, président des affaires techniques et politiques de l’Alliance Panafricaine pour la Justice Climatique (PACJA), lors de la COP23 en 2017 à Bonn, en Allemagne. Cette triste réalité rappelle combien il est essentiel de s’engager, individuellement et collectivement, dans la lutte contre le changement climatique et la dégradation de l’environnement.

Activité de reboisement à l’EPP Baka et formation des écoliers de l’EPP Camp-Adagbè à la fabrication de sacs biodégradables

C’est dans ce combat que s’inscrivent plusieurs organisations de jeunes au Bénin, dont l’ONG Save Our Planet. Convaincue que seule l’éducation environnementale peut changer les habitudes au sein des communautés, l’ONG a lancé le Projet de Renforcement de l’Éducation Relative à l’Environnement en Milieu Scolaire et Estudiantin. Ce projet vise à faire des élèves et des étudiants les acteurs d’un monde durable, capables de relever les défis climatiques et environnementaux actuels.

Les actions menées par cette organisation en témoignent. En 2021, des élèves de l’École Primaire Publique de Baka à Parakou ont participé à des activités de reboisement, et en 2023, des ateliers de formation sur la fabrication de sacs biodégradables ont été organisés au profit des écoliers du Complexe Scolaire Camp-Adagbè de Parakou.

L’objectif était de sensibiliser les enfants au reboisement et à l’utilisation de sacs biodégradables pour qu’ils abandonnent les sacs en plastique, néfastes pour la santé et l’environnement. « Une fois rentrée à la maison, je sensibiliserai mes frères aux dangers des sacs en plastique et les encouragerai à utiliser désormais des sacs en papier pour préserver notre santé et notre environnement », a promis Josline Balogoun, écolière en cours élémentaire 2ᵉ année au Complexe Scolaire Camp-Adagbè.

Megan Valère Sossou, directeur exécutif de l’ONG Save Our Planet, a profité de cette occasion pour plaider en faveur d’une interdiction stricte des sacs en plastique dans les écoles, conformément à la loi n° 2017-39 du 26 décembre 2017, interdisant la production, l’importation, l’exportation, la commercialisation, la détention, la distribution et l’utilisation de sachets en plastique non biodégradables en République du Bénin.

L’ONG ne laisse personne de côté dans son ambition d’éduquer à un environnement sain et durable. Dans la commune d’Adjohoun, les enfants à déficience intellectuelle du Centre Didier le Bihan ont été sensibilisés aux meilleures techniques d’hygiène et d’assainissement, renforçant ainsi leurs capacités à entretenir leur cadre éducatif de façon saine et durable.

Sensibilisation des enfants handicapés du Centre Didier le Bihan aux techniques d’hygiène et d’assainissement

Selon Alfreda Christiane Akotègnon, coordonnatrice Sud de l’ONG, cette initiative vise à étendre l’éducation environnementale aux groupes sociaux marginalisés, particulièrement vulnérables aux effets du changement climatique. Cette inclusion dans l’éducation environnementale est une action salvatrice, saluée par les activistes et les organismes en charge de la protection de l’environnement.

Dans le même esprit, la société Cité Fidèle sensibilise au reboisement comme moyen de lutter contre le changement climatique. En 2022, elle a organisé, au profit de l’Université de Parakou, la mise en terre de plus de 100 plants d’arbres.

Reboisement à l’université de Parakou

 « Les effets du changement climatique, tels que la mauvaise répartition des pluies, les excès de chaleur et les inondations, sont principalement dus à la destruction de nos patrimoines forestiers à travers la déforestation. L’objectif de cette activité est de sensibiliser les populations et de les encourager au reboisement », a déclaré feu Maxime Gbokpannon, alors président du groupement ayant conduit cette activité. Cette initiative illustre l’engagement de Cité Fidèle dans la lutte contre le changement climatique.

Inès Sehlan, une jeune activiste qui exprime son génie créatif pour limiter la pollution plastique

Inès Sehlan, étudiante et activiste écologiste résidant à Parakou, la cité des Koburu, est également engagée pour la protection de l’environnement. À travers le recyclage des déchets plastiques, elle crée des objets de décoration et d’autres articles utiles, tels que des fleurs, des sacs et des portemonnaies.

Inès Sehlan et ses articles conçus à base de déchets plastiques

Dans une interview accordée à Venance Tossoukpè du Journal Santé Environnement, elle a expliqué : « L’idée m’est venue de l’observation de mon environnement. J’ai constaté que les déchets plastiques représentent une pollution environnementale importante ». Pour la sociologue de formation : « Si une personne peut essayer de limiter sa consommation de plastiques, et que mille personnes s’y mettent, cela permettrait de réduire l’impact des déchets plastiques dans le monde ». Inès ambitionne d’implanter un centre de recyclage dans sa ville afin de réduire la pollution plastique tout en créant des emplois verts pour les jeunes.

Des emplois verts, Amir Azouzi en a créé un

Amir Azouzi, jeune Franco-Marocain de 28 ans, innove aussi dans le domaine de l’hygiène avec son bidet hygiénique écologique, Fini La Bouteille (FLB), conçu pour une hygiène intime respectueuse de l’environnement.

Amir Azouzi et son bidet écologique FLB

Il souligne qu’en plus d’être autonomes en électricité, les bidets FLB consomment peu d’eau et sont accessibles aux personnes vulnérables. « Il suffit juste d’appuyer sur un bouton, et le jet d’eau se charge de faire le nettoyage à votre place. Ce qui permet aux personnes vulnérables, notamment les femmes enceintes et les personnes en situation de handicap, de faire aisément leurs besoins sans aucune assistance », a-t-il rassuré.

A l’en croire, cette initiative est partie du constat que le papier toilette utilisé dans les toilettes classiques exige une grande consommation d’eau et induit une forte pression sur les ressources forestières. Les bidets FLB se positionnent ainsi comme une alternative pratique, saine et durable pour le bien-être de l’Homme et de la planète, dans un contexte où le changement climatique a de graves répercussions sur les modes de vie des communautés.    

Ces initiatives, portées par des jeunes Africains et Béninois, s’inscrivent dans une dynamique collective pour contrer les effets du changement climatique, même si le continent ne contribue qu’à environ 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, selon le GIEC.

Il est évident que chaque action compte dans la lutte contre le changement climatique. À l\’image du colibri, chacun de nous peut apporter sa goutte d\’eau pour préserver notre planète. Nous devons prendre exemple sur les initiatives des jeunes et des organisations qui œuvrent déjà sur le terrain pour éduquer, sensibiliser et protéger notre environnement. Ensemble, que ce soit par le reboisement, la réduction de l\’usage du plastique ou le recyclage, nous avons le pouvoir d’agir pour un avenir durable. Chacun de nous, à son niveau, peut contribuer à cet effort collectif.

Venance Ayébo TOSSOUKPE




Gestion durable du complexe W-Arly-Pendjari : les acteurs du Bénin en consultation nationale

Dans le cadre de l’initiative visant à renforcer la gestion durable du complexe W-Arly-Pendjari, le Centre National de Gestion des Réserves de Faune (CENAGREF) organise, depuis ce jeudi 19 décembre 2024, une consultation nationale à Grand-Popo.

Cette initiative bénéficie du soutien du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO, en collaboration avec le ministère du Cadre de Vie et des Transports chargé du Développement Durable, et de l’appui financier du gouvernement de la Norvège. Il s’agit de soutenir la conservation des sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial en Afrique dont le complexe W-Arly-Pendjari appartient.

La rencontre réunit une trentaine de participants, comprenant des experts, des représentants de la société civile, ainsi que des membres des forces de défense nationale et de sécurité publique.

Pour sa part, la secrétaire générale de la Commission nationale béninoise pour l’UNESCO, Pr Abossèdé Paulette Okpeicha, a insisté sur la nécessité pour le Bénin, le Burkina Faso et le Niger de synchroniser leurs actions pour améliorer la gestion et la protection de ce joyau qui joue des rôles capitaux. Elle a souhaité qu’à l’issue des travaux des actions concrètes soient identifiées pour relever les défis actuels soulignant l’engagement du Bénin à la Convention de l’UNESCO du 16 Novembre 1972.

Abdel-Aziz Babamoussa, Directeur Général du CENAGREF, a salué les progrès réalisés dans le cadre de l’accord tripartite signé en 2019, tout en exhortant à une mobilisation continue des ressources nécessaires pour mettre en œuvre les stratégies définies lors de cette rencontre et des prochaines assises régionales.

Dans son mot de bienvenue, Georges Sossou, Directeur Technique du CENAGREF, rappelé l’objectif de la rencontre. Il s’agit à l’en croire d’instaurer des processus transfrontaliers efficaces et opérationnels, respectant la souveraineté des États, pour protéger le Complexe W-Arly-Pendjari.

« Je saisis donc cette occasion pour saluer les avancées réalisées dans le cadre de l’Accord tripartite signé en 2019 et pour encourager la mobilisation continue des ressources nécessaires à la mise en œuvre des stratégies qui seront définies ici et lors des prochaines assises régionales » a confié le Directeur générale du CENAGREF avant de lancer officiellement au nom du Ministre du Cadre de Vie et des Transports chargé du Développement Durable.

Il importe de rappeler que cette initiative se tient après celle du Niger et du Burkina. Des consultations qui ont pour objectif d\’engager tous les acteurs clés dans l’élaboration de Plans Nationaux d\’Actions spécifiques à chaque pays. Elles constituent la première étape d’une série d’activité prévue au plan national et régional en vue d’une gestion durable du complexe W-Arly-Pendjari.

Megan Valère SOSSOU




Patrick Atangana Fouda : Un héros de la lutte contre le VIH nous quitte

Tout comme la communauté internationale, l’ONUSIDA pleure la perte de Patrick Atangana Fouda, un activiste exceptionnel et une figure emblématique de la lutte contre le VIH. Militant infatigable et voix des personnes vivant avec le VIH, Patrick a consacré sa vie à défendre les droits humains, à promouvoir l\’accès aux soins et à briser le silence entourant cette maladie.

Vivant lui-même avec le VIH depuis sa naissance, Patrick Atangana Fouda a su transformer sa réalité personnelle en un puissant moteur de changement. Il a courageusement partagé son histoire pour sensibiliser à l\’importance de la prévention, de la prise en charge et, surtout, de la lutte contre la stigmatisation. À travers son propre parcours, il a incarné l\’espoir et la résilience, prouvant que vivre avec le VIH n\’est pas une limite, mais une opportunité de redéfinir les perceptions et d\’inspirer les autres.

À travers son plaidoyer courageux et ses interventions percutantes, il a rappelé à tous l’urgence d’agir pour garantir un accès équitable à la prévention, aux traitements et aux droits humains pour les personnes vivant avec le VIH. Une anecdote marquante de sa vie témoignage de son esprit combatif et de sa volonté d’agir. Lors d’une conférence internationale sur le VIH, Patrick avait pris la parole spontanément après un panel pour interpeller les décideurs. Avec une voix ferme et une passion palpable, il avait déclaré : « Je suis ici, vivant avec le VIH. Je ne suis pas seulement un chiffre dans vos rapports, je suis une personne avec des rêves, une famille, et une dignité. Faites plus que des promesses, agissez maintenant ! » Ses mots, empreints de sincérité et de force, avaient ému tous les participants, réaffirmant la nécessité de replacer les voix des personnes affectées au centre de nos stratégies et incitant plusieurs organisations présentes à renforcer leurs engagements pour les communautés les plus affectées.

Patrick a mené un combat acharné pour défendre les droits et le bien-être des jeunes vivant avec le VIH, particulièrement les enfants. Il était profondément convaincu que chaque enfant, indépendamment de son statut sérologique, mérite tout comme lui, une vie pleine de possibilités et d’espoir. À travers ses initiatives, il a plaidé pour un accès équitable aux traitements pour les enfants vivant avec le VIH, dénonçant les inégalités criantes dans l’accès aux médicaments pédiatriques.

Son travail auprès des jeunes, notamment ceux d’Afrique de l’Ouest et du Centre, a inspiré toute une génération à se lever contre la stigmatisation et à exiger un avenir meilleur. Avec l’appui de notre bureau il a fondé le Réseau Afrique de l’Ouest et Afrique Central de D’adolescents et Jeunes Positifs (RAJ+ AOC), la première organisation régionale francophone d’adolescent(e)s et jeunes vivant avec le VIH. Patrick croyait fermement que l’éducation, la sensibilisation et la solidarité sont des piliers essentiels pour mettre fin à la transmission du VIH et pour garantir des vies dignes et épanouies.

Son combat pour le SIDA pédiatrique reste l’une des contributions les plus marquantes de son parcours. Il s’est battu sans relâche pour que les enfants vivant avec le VIH reçoivent des traitements adaptés, insistant sur le fait qu’aucun enfant ne devrait mourir à cause d’un manque de médicaments ou d’une prise en charge inadéquate.

Son partenariat avec l’ONUSIDA a été d’une valeur inestimable. Patrick était non seulement une voix pour les communautés, mais aussi un allié stratégique dans nos efforts pour briser les chaînes de la stigmatisation et de la discrimination. Il a contribué à façonner des initiatives clés visant à améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH, tout en plaidant sans relâche pour des politiques inclusives et durables.

Patrick a joué un rôle central dans de nombreuses initiatives internationales visant à améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec le VIH. Ses interventions dans des forums mondiaux, ses collaborations avec des organisations de santé publique, et ses efforts pour renforcer les systèmes de santé en Afrique ont été déterminants. Grâce à son travail, des milliers de personnes ont pu accéder à des services vitaux, tandis que des communautés entières ont appris à mieux comprendre et soutenir les personnes vivant avec le VIH.

Mais Patrick n\’était pas seulement un militant. Il était une source d\’inspiration pour les jeunes et pour tous ceux qui le connaissaient. Sa force intérieure, son humanité et sa détermination à surmonter les défis étaient palpables dans chacune de ses actions. Quelques jours avant sa mort, aux côtés des collègues d’ONUSIDA, il participait activement aux travaux de préparation de la Conférence internationale sur le SIDA et les IST en Afrique (ICASA) au Ghana, pour s’assurer que la voix des jeunes était entendue. Alors que nous pleurons sa perte, nous restons résolus à poursuivre son combat avec la même détermination et la même passion qu’il incarnait.

La vie de Patrick Atangana Fouda témoigne de l\’impact qu\’une personne peut avoir en choisissant de transformer sa propre expérience en une force pour le bien commun. Son engagement et sa résilience continueront d\’inspirer les générations futures dans la lutte pour un monde sans VIH et sans stigmatisation.

C’est pourquoi au nom de l’ONUSIDA pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, j’adresse un message d’espoir et de détermination à tous les jeunes de notre région. Patrick croyait en votre force, en votre capacité à transformer vos défis en opportunités, et en votre pouvoir de bâtir un avenir sans stigmatisation ni exclusion.

En son honneur, je vous invite à poursuivre le combat qu’il a si courageusement mené. Faites entendre vos voix, engagez-vous pour le changement et inspirez le monde par votre résilience. Patrick aurait voulu que vous continuiez à vous battre, non seulement pour vous-mêmes, mais pour tous ceux qui comptent sur votre leadership et votre courage.

Repose en paix, Patrick. Ton combat et ton héritage vivront à travers ces jeunes que tu as tant aimés et défendus.

Berthilde Gahongayire




Ces pesanteurs qui clouent au sol les innovations africaines

Bien qu’elles répondent aux besoins du continent, les solutions africaines sont souvent étouffées par le caractère extraverti de nos habitudes de consommation, entre autres.

  • En plein essor dans de nombreux domaines, les innovations africaines peinent paradoxalement à s’imposer
  • Reflexe des importations, complexe du colonisé et absence de politiques nationales sont les raisons citées
  • On invite les Etats à avoir de véritables politiques de R&D et les innovateurs à se mettre en réseau

« Cette machine que vous voyez est mise au point pour rendre le travail des menuisiers moins pénible », explique à SciDev.Net Fatoumata Binta Diallo, ingénieure à la Dakar American University of Science & Technology (DAUST) et membre d’une équipe d\’innovateurs venus présenter leurs innovations au salon d’exposition dénommé DAUST Impact, tenu au mois de mai dernier.

La DAUST est une école spécialisée dans la formation aux métiers de l’ingénierie mécanique et informatique ainsi qu’aux nouvelles technologies. Elle est l’une des rares institutions au Sénégal à avoir l’innovation technologique et scientifique comme priorité.

En guise de démonstration, l’ingénieure actionne, en quelques clics sur son ordinateur portable, le mécanisme de découpe du bois. Une vingtaine de secondes plus tard, les planches disposées sous la lame de la machine sont toutes découpées.

 « Vous voyez ? C’est tellement facile et rapide », commente-t-elle, avant de poursuivre : « Nous avons remarqué qu’au Sénégal, les travailleurs du bois entrent en contact direct avec les outils de découpe et cela comporte beaucoup de risques d’accidents. Certains se blessent grièvement ou perdent leurs doigts. Notre machine vient enlever de leur travail cette partie qui comporte des risques de blessure ».

Cette machine à découper fait partie d’une cinquantaine de projets exposés au cours de ce salon organisé par la DAUST à Somone, ville située à environ 80 kilomètres de Dakar, la capitale sénégalaise.

« Ces projets couvrent beaucoup de domaines : l’agriculture, les biens de services, la santé, l’environnement, la robotique, le spatial, la substitution du minéral de bentonite par un minéral local dans le domaine du pétrole et du gaz, etc. », fait savoir Mamadou Diop, enseignant-chercheur et directeur des études de la DAUST.

Ce salon d’exposition est une parfaite illustration de ce que le paysage des inventions et innovations en Afrique est en plein essor. Quel que soit le domaine, les initiatives se multiplient…

Au Congo, par exemple, l’ingénieur Luvick Otoka a conçu un détecteur de fuite de gaz dénommé « Keba na Gaz ». Destiné aux ménages afin de leur permettre d\’éviter d\’éventuels incendies, le détecteur est disponible en plusieurs modèles.

« Le premier qui est fini à 100 % détecte la fuite de gaz et vous alerte par des signaux lumineux et des bips sonores. Le son devient de plus en plus aigu si aucune disposition n\’est prise et ne s\’arrête que quand il n\’y a plus de gaz présent dans la maison. Il a une batterie incorporée et peut fonctionner sans électricité », explique le concepteur.

Ses compatriotes Landry Ndinga et Yannick Mboumba, deux jeunes entrepreneurs, ont quant à eux conçu un générateur d’eau qui transforme l’air ambiant en eau potable. Ils ambitionnent, grâce à leur invention, dénommée « Moboti Mayi », d’améliorer l’accès à l’eau potable au Congo, mais aussi dans les pays africains confrontés à un manque d’eau potable.

Le générateur d’eau est muni d’un dispositif qui permet de produire de l\’eau en transformant la vapeur d\’eau contenue dans l\’air ambiant et peut fonctionner à la fois avec le courant domestique, le groupe électrogène et les panneaux solaires, expliquent-ils.

Complexe d’infériorité

Pour autant, malgré ce dynamisme, les inventions et innovations africaines peinent à jouer les premiers rôles sur le continent, mais aussi à l’échelle internationale. Selon l’Indice mondial de l’innovation de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle 2023, sur les 132 pays classés, les pays africains occupent pratiquement les derniers rangs.

Yannick Mboumba et Landry Ndinga pensent que cette situation s’explique par le fait que « les conservateurs restent accrochés aux solutions traditionnelles plutôt que de s’ouvrir aux solutions innovantes d’une part ; et d’autre part par le fait que la jeune génération est plus friande des solutions technologiques et scientifiques proposées par des chercheurs et promoteurs d’ailleurs ».

Un point de vue partagé par le Béninois Apollinaire Gandonou, inventeur du « foyer sans soucis ». C’est un foyer écologique connecté à un panneau solaire et qui utilise les coques de noix de palme comme combustible.

« Nous n’aimons pas consommer local. Nous n’aimons pas donner de la valeur aux produits locaux. Nous sommes friands de ce qui est importé », déplore-t-il.

 « On se dit souvent que les autres produisent mieux que nous », renchérit Luvick Otoka. Or, ajoute-t-il, « nos innovations sont mieux adaptées à notre contexte socio-culturel. Il faudrait que les consommateurs sachent que nos solutions ne sont peut-être pas mieux présentées que celles des autres, mais elles sont efficaces pour résoudre nos réels problèmes. Et il se trouve juste que les conditions ne sont pas réunies pour produire comme les autres. Mais il nous faut une approche patriotique et panafricaine ».

Concepteur de la couveuse néonatale connectée, Serge Armel Njidjou est plus nuancé. L’innovateur et entrepreneur technologique camerounais reconnait qu’il subsiste un « complexe d’infériorité de certains Africains » vis-à-vis des produits importés. Mais, il reconnaît que ce qu’on présente comme innovation, ce sont des choses qui ne sont souvent pas très connectées à l’écosystème utilisateur.

« L’innovation pour moi, c’est quelque chose de nouveau dans un contexte, mais surtout qui est adopté. (…) On a beaucoup de spectacles, mais pas de vraies innovations. Ce sont de petits changements qu’on met en œuvre dans un environnement pour l’adapter au contexte », explique-t-il.

 « Par exemple, je n’ai pas inventé la couveuse, il y avait déjà des couveuses. Mais je suis parti du principe que comme on a beaucoup de problèmes d’électricité, peut-être il faudrait des couveuses solaires. Comme on a peu de pédiatres, peut-être qu’il faudrait des couveuses connectées, pour que les pédiatres puissent suivre les nouveau-nés sur leurs téléphones », explique Armel Njidjou.

Et de poursuivre : « une fois que je fais le prototype, il faut que j’emmène à l’hôpital et que les gens l’utilisent et que ça corresponde à leurs préoccupations et à leurs habitudes, qu’ils y trouvent leur intérêt et qu’ils soient prêts à l’adopter. Tant que ces étapes ne sont pas franchies, on ne peut même pas parler d’innovation ».

En général, si ces étapes étaient franchies, insiste-t-il, la suite serait plus facile, « parce qu’on saurait que c’est un produit qui correspond à tels utilisateurs, à tels bénéficiaires qui sont potentiellement prêts à consommer et donc qu’on doit développer », soutient l’innovateur.

Absence de législation et de fonds dédiés à l’innovation

Toutefois, Armel Njidjou reconnaît aussi que notre environnement n’est pas favorable à l’éclosion des innovations. Il affirme que « la graine de l’innovation ne peut pas pousser sur une terre aussi aride que la nôtre. Nos États n’ont pas de législations pour favoriser l’innovation », regrette-t-il.

 « Si vous voulez faire un truc technique, vous avez besoin d’outils de production. Ailleurs, vous allez trouver des fablabs (laboratoires de fabrication) pour faire au moins rapidement les premiers prototypes. Ici, vous n’allez pas les trouver. Comment avoir donc les moyens qui vont financer votre prototype ? Par conséquent, beaucoup d’initiatives restent au stade artisanal… », affirme-t-il.

L’ingénieur togolais en électromécanique et fondateur du Centre de recherche, d’inventions et d’innovations technologiques (CRIIT Lado Concept), Edouard Akakpo-Lado, soutient pour sa part qu’il manque de fonds dédiés à la recherche et au développement en Afrique. « Les recherches sont faites avec des fonds propres par des inventeurs et innovateurs isolés dans leur coin », souligne l’intéressé pour le regretter.

Conséquence : de nombreuses inventions et innovations ne sont pas viables au bout d’une certaine période, constate Apollinaire Gandonou.

« Généralement, l’inventeur fait tout du début jusqu’à la fin avec ses propres moyens. À un moment donné, quand il est essoufflé, tout tombe à l’eau parce qu’il n’y a pas de soutien technique ni financier. Moi, par exemple, je suis allé au Nigeria pour faire du taxi-moto. Ce sont mes économies que j’ai investies dans mon projet. Mais avec ça, le résultat ne sera jamais comparable à celui de quelqu’un qui a les accompagnements qu’il faut », analyse-t-il.

Abdoulaye Faye, cofondateur et directeur technique de « CAYTU Robotics », partage cet avis. Sa start-up se distingue dans la fabrication de robots de services et la fourniture de plateformes de contrôle à distance. Connue notamment pour son drone de livraison de repas, opérant depuis Dakar jusqu\’aux États-Unis, la société a été honorée par le Grand Prix du chef de l\’État pour l\’innovation et la recherche lors de la semaine du numérique au Sénégal en mai 2023.

Il soutient que « le domaine de l’innovation et de la recherche est un domaine où il faut acheter beaucoup de matériels qui coûtent cher. C’est donc un apport en financement qui peut permettre un réel développement de ce secteur. C’est le financement qui peut aussi permettre de recruter de nouveaux talents, de produire des prototypes et d’être compétitif à l’international », relève-t-il.

Contraintes financières

Yannick Mboumba et Landry Ndinga connaissent très bien ces contraintes financières. Selon leur témoignage, jusqu’ici, ils ont financé sur fonds propres les différents prototypes du générateur d’eau « Moboti Mayi », qui a une capacité actuelle de production de 12 litres d’eau par jour.

 « Nous avons besoin de partenaires techniques et financiers pour améliorer la dernière version de façon à réduire le temps de production et augmenter considérablement la quantité d\’eau produite. Mais depuis des années, nous n\’avons que des promesses. Il n\’y a vraiment pas du concret pour nous permettre d\’avancer », déplorent-ils.

Également confronté à ce manque de financement, Luvick Otoka affirme être dans l’incapacité de produire en grande quantité son détecteur de fuite de gaz. Pourtant, dit-il, la demande est « forte »…

« Nous sommes en train de chercher les fonds pour une production considérable parce que, avec nos propres moyens, nous ne pouvons produire que 500 exemplaires alors que la demande est grande. Il y a des entreprises qui veulent 1 000 ou 2 000 exemplaires. Avec nos moyens propres, nous ne sommes pas capables de satisfaire une telle demande », confie l’inventeur.

Pour Dodzi Kossi, directeur de la recherche scientifique et technique au ministère de l\’Enseignement supérieur et de la Recherche du Togo, c’est ce faible soutien financier accordé aux innovateurs locaux qui favorise l’importation de produits étrangers par les États africains.

« Parfois, les gens importent des produits parce qu’il n’y a pas mieux sur le plan national, parce qu’il n’y a pas mieux à proximité. C’est pourquoi ils sont obligés d’importer certains produits. Ailleurs, les inventeurs et les innovateurs sont subventionnés ; ce qui leur permet de mettre sur le marché, y compris sur les marchés internationaux, des produits subventionnés beaucoup plus compétitifs et qui présentent des gages de qualité », explique-t-il.

« La réponse aux questions de développement implique un engagement transversal des États qui commence par la qualification d’une ressource humaine qui soit à la hauteur de la nécessité d’apporter des solutions technologiques pour faciliter la transformation locale des ressources minières, minéralières et organisationnelles », appuie François Bouansa, directeur de l’Innovation technologique à la Direction générale de l’innovation technologique (DGIT) en République du Congo.

Cependant, poursuit-il, la concurrence sur le marché de la mondialisation impose des défis à relever à l’échelle organisationnelle, de production en chaine et de tous les moyens technologiques qui s’y prêtent.

« Les besoins urgents des marchés ne permettent pas aux administrations africaines de rivaliser avec les pays industrialisés. L\’avantage technologique des nations développées et la compétence des ressources humaines favorisent une production de qualité en chaine à un prix défiant toute concurrence », précise François Bouansa.

Manque de connexion

D’autres facteurs tels que le manque de connexion entre innovateurs, centres d’innovations et les grandes entreprises du secteur privé africain peuvent expliquer la faible compétitivité des innovations africaines à l’échelle mondiale, précise Mamadou Diop.

« L’une des causes du manque de soutien aux chercheurs et innovateurs africains, c’est l’absence d’une tradition de collaboration entre les universités et les entreprises qui sont dans le domaine industriel », introduit-il.

Pour lui, cette absence de collaboration a pour corollaire le manque de financement des start-up et des porteurs de projets innovants pour leur permettre d’être plus créatifs et compétitifs.

« Normalement, pense-t-il, les entreprises devraient financer les recherches scientifiques et la mise en place des prototypes. Il faut donc renforcer la collaboration entre chercheurs et entreprises susceptibles d’utiliser les résultats des recherches », ajoute-t-il.

Les responsabilités sont partagées entre les inventeurs et les innovateurs africains d’une part et les États d’autre part, soutient pour sa part François Bouansa. Ce dernier déplore le fait que les chercheurs et entrepreneurs travaillent la plupart du temps sur les mêmes projets et n’arrivent pas à se constituer en réseau. Leur incapacité à créer des partenariats afin d’éviter de compter sur les financements de leurs États constitue aussi un frein, soutient-il.

Mais pour Djiba Millimono, coordinateur du « Grand concours jeunes entrepreneurs », un projet qui a pour but de lutter contre le chômage des jeunes et l’émigration en les accompagnant dans les domaines du numérique et de l’agrobusiness en Guinée, l’Afrique « est un peu sanctuarisée ».

« Il n’y a pas un véritable programme d’accompagnement de ces start-up qui évoluent dans le domaine de l’innovation, ni un cadre juridique qui favorise un réseautage pouvant leur permettre de compétir ou d’avoir un accompagnement. A cela s’ajoutent la cherté des matières premières et un manque d’identification des besoins du marché… », détaille-t-il.

Pour illustrer ce manque d’accompagnement, François Bouansa révèle par exemple qu’en dépit de l’arsenal administratif mis en place au Congo pour identifier, appuyer et accompagner les inventeurs et innovateurs, « dans la pratique, on ne constate pas grand-chose. La DGIT, qui a entre autres missions d’identifier et de faire la promotion des inventeurs et innovateurs, a le budget le plus faible du ministère. »

De telles conditions ne permettent pas aux inventeurs, innovateurs et chercheurs « de réaliser de véritables exploits. Alors les produits obtenus dans ces conditions précaires ne peuvent pas s’imposer sur le terrain, mais vont rester dans les tiroirs », ajoute cette source.

Système de valorisation

Toutefois, certaines inventions ou innovations africaines ont réussi à se démarquer en Afrique et même au-delà. C’est le cas par exemple du Cardiopad, conçu et fabriqué par l’ingénieur camerounais Arthur Zang. Ou encore de la couveuse néonatale connectée d’ Armel Njidjou.

« À l’époque, on avait juste notre atelier à Bafoussam (Ouest-Cameroun). Aujourd’hui, on a trois sites (Yaoundé, Douala, Bafoussam) avec une présence dans 5 pays africains (Mali, Sénégal, RDC, Benin et Côte d’Ivoire). Le produit a été homologué en 2020. On va atteindre les 200 couveuses vendues », se félicite ce dernier.

Cependant, il soutient que « la projection à l’international est difficile. Un peu partout chez nous, c’est comme si les lois sont faites pour importer. Quand vous fabriquez, vous vous retrouvez face à des législations complétement illogiques, face à des fonctionnaires qui ne comprennent rien, et on est sur le médical. Le processus d’homologation dans divers pays est pour nous une barrière alors que le potentiel est vraiment énorme », confie-t-il.

Pour Rosy Kadel Ntsiloulou, secrétaire général de l’Association des inventions et innovations du Congo Brazzaville, les inventions qui sont créées en Afrique auront de la valeur si et seulement si nous mettons en place un autre système capable de les valoriser.

« Une fois que nous les valoriserons nous-mêmes, les autres leur accorderont de la valeur. Il y a des produits, par exemple, qui vont vous demander de l\’or pur, un petit cristal de diamant ou du cobalt ou encore du mercure. Mais on ne peut pas les avoir parce qu’on n’a pas tous les moyens nécessaires, ni les centres de recherches technologiques adéquats pour pouvoir faire les recherches, transformer ces matières premières en produits qui seront utilisés afin d\’avoir des inventions qui auront une viabilité dans le temps et l\’espace », soutient-il.

Soutien à l’innovation

Même si innovateurs et inventeurs s’accordent sur les maux qui freinent une véritable émergence des innovations et inventions en Afrique, certaines institutions, organismes et autres fondations s’investissent de plus en plus dans l’accompagnement des porteurs de projets innovants sur le continent.

C’est le cas par exemple au Sénégal de l\’Agence belge de développement (Enabel), du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), ou encore de l’Agence luxembourgeoise de coopération et de développement (Luxdev). Cette dernière a inscrit le financement et le soutien à l’innovation comme priorités, selon sa responsable chargée du secteur privé et des partenariats, Ndèye Awa Guèye.

A travers son projet LuxAid challenge Fund, doté d’un million d’euros et lancé en novembre 2023, l’agence entend accompagner et cofinancer un total de dix innovations à fort impact portées par des jeunes entreprises ayant moins de 5 années d’existence ou des start-up du Mali, du Burkina Faso et du Sénégal, selon les explications de Ndèye Awa Guèye.

Pour cette première édition, elle précise que seuls les secteurs relevant de la sécurité alimentaire et de l’apprentissage à distance seront financés. Chaque start-up ou projet retenu pourra bénéficier d’un cofinancement allant jusqu’à cent quarante mille euros.

À travers son programme d’entrepreneuriat lancé en 2015, la Fondation Tony Elumelu figure parmi les organisations qui accordent des financements aux start-up sur le continent. Contactée à plusieurs reprises, elle n’a cependant pas souhaité répondre aux questions de SciDev.Net.

Quant à la Fondation Mo Ibrahim, elle renvoie SciDev.Net au rapport du Forum Ibrahim 2024 qui souligne que l’Afrique a besoin de financement pour atteindre ses objectifs de développement.

En plus des financements, Serge Armel Njidjou martèle qu’il faut avoir la culture du travail en équipe. « C’est tellement compliqué que, pour avoir une chance de réussir, il faut être une équipe. Il y a très peu d’équipes d’innovateurs chez nous ; ce sont toujours des individualités. Les aventures solitaires ne sont pas susceptibles d’inspirer la confiance des gens qui pourraient financer ou accompagner l’innovation », insiste-t-il.

Incubateurs technologiques

L’une des solutions préconisées par François Bouansa est la mise en place d’incubateurs technologiques. « L’incubateur sera le puissant catalyseur du succès des projets dans le paysage dynamique de l’innovation et de l’entrepreneuriat », dit-il.

Ce dernier explique que « la mise en place d’un incubateur constitue un pôle de créativité et de développement qui rassemble des inventeurs, des chercheurs et des entrepreneurs dans un espace collaboratif qui facilite les rencontres fortuites, créant des opportunités de réseautage et conduisant à des innovations raffinées ».

En outre, Dodzi Kossi pense qu’il faut mettre en place des mécanismes d’accompagnement tels que des fablabs qu’il présente comme des espaces où il y a des infrastructures nécessaires pour que les innovateurs qui n’ont pas la possibilité de créer eux-mêmes un centre de développement de leurs produits, puissent avoir l’équipement nécessaire pour le faire.

« Quand vous prenez aujourd’hui la Silicon Valley (États-Unis), c’est un espace où il y a tous les équipements et toutes les infrastructures. Un espace où les inventeurs, chercheurs et autres… font des expérimentations et développent des produits. Pourquoi ne pas créer aussi des parcs scientifiques et technologiques, des technopoles dans nos pays où les inventeurs puissent développer leur talent ? » S’interroge-t-il.

A l’en croire, les jeunes ont des talents, ils conçoivent les premiers modèles, mais ce ne sont pas des modèles aboutis parce qu’il n’y a pas d’appui pour déjà faire le prototypage. « Or c’est le premier prototype qui attire les investissements », indique Dodzi Kossi.

Quelques incubateurs technologiques existent dans certains pays africains. Au Sénégal par exemple, l’incubateur technologique FRTN Technologie, spécialisé dans la formation et l’accompagnement des porteurs de projets technologiques, guide les innovateurs jusqu’à la mise sur le marché de leurs produits, depuis la phase de conceptualisation jusqu’à celle de la disponibilité du produit final.

« L’une des structures à avoir bénéficié de notre accompagnement est « Clarize Technology Group », une start-up spécialisée dans la proposition de solutions cloud aux entreprises et aux particuliers. Nous avons aussi accompagné PRO DEME, une start-up spécialisée, elle, dans la gestion de déchets et la production de l’énergie renouvelable », explique Mbemba Diallo, start-up mentor chez FRTN Technologie.

Toutefois, « malgré les efforts qui sont faits, nos innovateurs ont toujours des difficultés d’accès aux sources de financements… », regrette-t-il.

Selon Dodzi Kossi, les États africains devraient tenir leur promesse faite en 2006 de consacrer 1 % de leur produit intérieur brut (PIB) à la recherche et au développement. « Aujourd’hui, c’est à peine 0,51 % du PIB en moyenne que nous investissons dans les pays africains », se désole le directeur de la recherche scientifique et technique au ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche du Togo.

Il propose aussi la mise en place de mécanismes d’assurance qualité pour garantir la qualité et la compétitivité des produits, « parce que nous sommes de plus en plus dans des marchés ouverts. Si nous ne prenons pas garde, ce sont d’autres produits qui vont encore inonder nos pays ».

Armel Ndjidjou rappelle que la priorité devrait être accordée aux produits locaux. « Il faut qu’on comprenne que pour que nos petites initiatives émergent, il faut que dès qu’on a une bonne innovation, qu’on la protège pour qu’elle se développe », conclut-il.

Brice Kinhou, Kuessi Giraud Togbé, Beatrice Longmene Kaze et Charles Kolou




L\’UNFPA offre un don de plus d’un milliard de francs CFA au Ministère de la Santé du Bénin

Le mardi 10 décembre 2024, une cérémonie de remise de matériels, équipements et produits de santé d’une valeur totale de 1 177 800 506 francs CFA s’est tenue entre le représentant résident de l’UNFPA au Bénin, M. Richmond TIEMOKO, et le ministre de la Santé, Prof. Benjamin HOUNKPATIN.

Ce don représente un acte fort dans le renforcement du système de santé béninois, particulièrement dans les domaines de la santé maternelle, néonatale et reproductive.

Parmi les matériels remis, on retrouve 95 concentrateurs d’oxygène, pour améliorer la prise en charge des patients en situation d’hypoxie. 75 tables d’accouchement et 15 tables d’examen, pour optimiser les conditions de travail dans les maternités. 126 lits d’hospitalisation avec matelas et 44 autoclaves de 24 litres, indispensables pour la stérilisation des instruments médicaux. 37 ventouses obstétricales et 191 kits d’AMIU, pour appuyer les interventions obstétricales complexes. 50 000 comprimés d’Azithromycine (250 mg), utilisés pour prévenir les infections. 5 oxymètres de pouls et 2 tables de réanimation pour nouveau-nés, essentiels pour la surveillance et le soin des patients les plus vulnérables. 33 kits d’accouchement pour sage-femme, adaptés aux maternités SONU (Soins Obstétricaux et Néonatals d\’Urgence). 12 échographes et une table opératoire, pour renforcer les capacités diagnostiques et chirurgicales. Des modèles anatomiques, pour la formation des professionnels de santé.

L\’UNFPA a également fourni 1 ambulance et 1 véhicule de supervision pour le Département de l’Atlantique. 8 motos ambulances, afin de faciliter les références des patients vers les centres de santé communautaires. 32 motos pour les Agents de Santé Communautaires Qualifiés (ASCQ), afin de renforcer leur mobilité.

Le don est aussi composé des contraceptifs, des produits vitaux pour la santé maternelle, ainsi que des équipements innovants tels que : 4 000 ballons de tamponnement utérin et 15 000 draps gradués de collection des pertes sanguines, dont la réception est prévue dans les prochains jours.

Cette initiative de l’UNFPA vise à améliorer les soins de santé dans les structures publiques et à réduire les décès maternels et néonatals au Bénin. Le ministre de la Santé, Prof. Benjamin HOUNKPATIN, a exprimé sa gratitude envers l’UNFPA pour cet appui qui contribuera grandement à atteindre les objectifs nationaux en matière de santé.




La reine d\’Oussouye : une voix forte contre les violences faites aux femmes et aux filles

« Il faut briser le silence pour mieux lutter contre les violences faites aux femmes et aux filles en Afrique » la reine du royaume d’Oussouye.

Parmi les intervenants au Forum des Médias sur l’élimination des violences faites aux femmes et aux filles en Afrique figurent des leaders communautaires tels que la reine Ahan Kalidji Béatrice, une figure emblématique de la défense des droits des femmes et des filles.

Ahan Kalidji Béatrice

Très engagée aux côtés de d’ONU Femmes pour la lutte contre les mariages précoces et les mutilations génitales féminines, elle a co-animé un panel à la deuxième journée du forum. Il s’est agi du partage de son expérience dans la lutte contre des violences faites aux femmes et aux filles.

Intronisée à l’âge de 14 ans en août 2000, Ahan Kalidji Béatrice, qui venait tout juste de réussir son examen d’entrée en 6e, codirige aujourd’hui les 17 villages de son royaume aux côtés de son époux, le roi Sibilumbaï Diédhiou. Bien que ses rêves de poursuivre ses études aient été contrariés par les traditions royales, elle s’est imposée comme une ardente militante des droits des femmes.

Son engagement l’a menée à remettre en question certaines pratiques du royaume. Traditionnellement, chaque village envoyait une jeune fille et un jeune garçon à la cour royale, mais la reine a insisté pour que ces enfants restent dans leurs familles et poursuivent leur scolarité.

Une reine engagée contre les violences faites aux femmes et aux filles

Aujourd’hui ambassadrice d’ONU Femmes, Ahan Kalidji Béatrice milite contre les mariages précoces et les mutilations génitales féminines, qu’elle considère comme des traditions néfastes pour les jeunes filles.

Parlant de la violence physique, il est inacceptable qu’un homme frappe sa femme dans le royaume d’Oussouye«Dans le royaume d’Oussouye, il est formellement interdit à un homme de lever la main sur son épouse. Si vous frappez votre femme, c’est comme si vous frappiez votre mère », rappelle-t-elle fermement. Cependant, la forme verbale des violences faites aux femmes et aux filles serait plus grave. Son rôle de médiatrice entre les hommes et les femmes de son royaume lui a permis de comprendre les profondes cicatrices laissées par ces formes de violence.

C’est pourquoi, chaque année, lors de la fête annuelle du royaume, une journée est consacrée à la dénonciation des violences, notamment les vols, les viols et autres abus. La reine invite sa communauté à briser le silence et à s’exprimer sur ces problématiques.

Ayant elle-même été victime d’un mariage précoce, la reine d’Oussouye fait de cette lutte son cheval de bataille. À travers des campagnes de sensibilisation et d’éducation soutenues par ONU Femmes, elle œuvre pour l’éradication de ces pratiques.

Son intervention au Forum des Médias a résonné comme un appel à l’action. « Le silence alimente la perpétuation des violences », a-t-elle déclaré, invitant les participants à unir leurs efforts pour construire une Afrique où les femmes et les filles peuvent vivre sans crainte ni oppression.

Le Forum, qui s’achève ce vendredi 6 décembre 2024, a permis de savoir que des voix comme celle d’Ahan Kalidji Béatrice sont essentielles pour faire progresser la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles sur le continent.

Megan Valère SOSSOU




Forum des Médias à Dakar : Le cri d\’alarme de Dr Dieynaba Ndao contre les violences faites aux femmes et aux filles en Afrique

Le Forum des Médias sur l’élimination des violences faites aux femmes et aux filles en Afrique, actuellement en cours à Dakar, Sénégal, offre une plateforme de partage de connaissances et d’expériences pour plusieurs acteurs et experts engagés dans cette lutte.

Dr Dieynaba Ndao, Chargée de projets Genre et Santé Sexuelle et Reproductive au Bureau régional Afrique de l’Ouest et du Centre d’ONU Femmes, a dressé un tableau préoccupant de la situation des femmes et des filles dans ces régions. Les données présentées lors de son intervention mettent en lumière une réalité alarmante.

« Quarante femmes sur cent en Afrique de l’Ouest ont subi une forme de violence, contre soixante-neuf sur cent en Afrique centrale », a-t-elle révélé. Une part de cette violence se manifeste désormais sur les réseaux sociaux, où quarante-cinq utilisatrices de Facebook et Twitter sur cent ont rapporté avoir été victimes de violences basées sur le genre.

Les filles ne sont pas épargnées a-t-elle déclaré, « trente-neuf d’entre elles sur cent sont mariées avant l’âge de dix-huit ans ». Par ailleurs, la prévalence des mutilations génitales féminines (MGF) atteint des niveaux alarmants, touchant vingt-huit femmes sur cent, avec des pics allant jusqu’à quatre-vingt-quinze sur cent dans certains pays.

Selon Dr Ndao, les violences à l’égard des femmes et des filles revêtent de multiples formes, notamment la violence exercée par un partenaire intime (physique, sexuelle ou émotionnelle), la violence économique, les mariages forcés et précoces, les mutilations génitales féminines, la traite des êtres humains, les crimes d’honneur, ainsi que les violences facilitées par les technologies numériques.

Ces violences, qui affectent des millions de femmes et de filles chaque année, trouvent leurs racines dans des structures patriarcales, des normes sociales discriminatoires et un accès limité à la justice.

Organisé par le Réseau des Médias Africains pour la Promotion de la Santé et de l’Environnement (REMAPSEN), avec l’appui technique et financier d’ONU Femmes et des Fonds français MUSKOKA, ce forum s’achèvera ce vendredi 6 décembre 2024. Il se positionne comme un appel à une mobilisation renforcée pour un avenir où les femmes et les filles pourront vivre libres de toute forme de violence.




Rencontre stratégique au CEVASTE à Pahou : Un plaidoyer pour des politiques agroécologiques au Bénin

Face aux défis environnementaux et climatiques que subisse le Benin avec ses effets néfastes sur l’agriculture et la sécurité alimentaire, le Centre d’Expérimentation et de Valorisation de l’Agroécologie et des Sciences et Techniques Endogènes (CEVASTE) en partenariat avec le Réseau Africain de la Biodiversité (ABN), s’est engagé à promouvoir l’agroécologie, la gestion durable de l\’eau et la préservation des sols au Bénin.

C’est pourquoi dans le cadre de son projet visant à renforcer le réseautage et  influencer les politiques sur la souveraineté alimentaire, la résilience communautaire et régénération de la diversité  biculturelle en Afrique, le CEVASTE a organisé une rencontre stratégique ce jeudi 28 novembre 2024 à Pahou sous le leadership du père JAH.

Les participants à la rencontre stratégique

L’objectif de cette rencontre stratégique à en croire est de sensibiliser les décideurs et de formuler des recommandations pour l’adoption de pratiques agro écologiques. Un objectif qui a reçu l’adhésion de nombreux acteurs.

Autrement dit, selon Jean Daniel Edwens, chargé de projet au CEVASTE, il s’agit d’impulser des réformes favorables à l’agroécologie les politiques et l\’opinion publique.

Cette journée stratégique a réuni une diversité d’acteurs : chefs de villages, agriculteurs, chercheurs, et membres d’organisations partenaires, notamment la Fédération d\’Agroécologie du Bénin (FAEB). Ces parties prenantes ont apporté leurs perspectives pour enrichir les discussions.

Le Président de la FAEB, dans son intervention, a exposé les avantages de l’agroécologie, notamment son rôle dans la préservation des ressources naturelles. Il a également exprimé son inquiétude face à la disparition progressive de certains mets traditionnels, témoins d’une richesse culturelle menacée.

Visualisation de film documentaire

Un documentaire illustrant des techniques agroécologiques a été projeté, suscitant des échanges animés parmi les participants. Les discussions ont porté sur des stratégies concrètes pour intégrer l’agroécologie dans les pratiques agricoles et les politiques publiques.

Pour Gbedewa Bernard, chef du village de Tori-Gbedewahoué, l’agroécologie constitue une voie essentielle pour garantir la sécurité alimentaire et, par conséquent, une meilleure santé pour les communautés.

Quant aux producteurs, ils se sont réjoui et ont remercié le CEVASTE de leur avoir donné cette opportunité de renforcement de capacité et du réseautage sur l\’agroécologie au Bénin. Ils ont été mieux aguerris et comptent restituer à leurs différentes bases l\’importance d\’adopter les techniques agroécologiques pour une prise de conscience générale.

A noter que cette activité s’inscrit dans la volonté de renforcer la visibilité de l’agroécologie comme une alternative durable et viable pour répondre aux crises environnementales.

Cette rencontre stratégique tenue dans le cadre du projet, Renforcer le réseautage, Influencer les politiques sur la souveraineté alimentaire, la résilience communautaire et régénération de la diversité  biculturelle en Afrique témoigne de l’engagement du CEVASTE à promouvoir l’agroécologie, la gestion durable de l’eau et la préservation des sols au Bénin.

Jacob SOBAKIN




Amnesty International Bénin plaide pour des réformes en santé publique

Dans le cadre de la campagne nationale sur l’éducation au droit à la santé au Bénin, Amnesty International Bénin et ses partenaires ont organisé, ce mardi 26 novembre 2024, une grande caravane motorisée de sensibilisation à travers la ville de Cotonou. Une foule composée d’hommes, de femmes et de jeunes est partie de la Place de l’Étoile Rouge, la caravane a emprunté plusieurs axes stratégiques avant de s’arrêter devant le ministère de la Santé, à Akpakpa.

Sur place, Orion Biao, Coordonnateur de l’Éducation aux droits humains à Amnesty International Bénin, a pris la parole pour livrer un message poignant. « La santé est un droit fondamental de l’être humain, indispensable à l’exercice de tous les autres droits », a-t-il déclaré devant une assemblée attentive. Il a également évoqué les conclusions alarmantes d’une étude menée par Amnesty International Bénin en 2023.

« Cette étude révèle que 71 % des usagers et usagères des services de santé estiment que leur droit à l’information n’est pas respecté. Le consentement aux soins, pourtant essentiel, reste un défi majeur. Pire encore, des femmes enceintes rapportent des abus allant de l’absence d’explications sur les soins reçus à des violences verbales et physiques », a-t-il dénoncé avec gravité.

Ces pratiques, a-t-il ajouté, exposent particulièrement les femmes à des vulnérabilités inacceptables dans un environnement hospitalier censé être protecteur.

Un plaidoyer fort devant le ministère de la Santé

Pour conclure, il a plaidé : « Nous souhaiterions compter sur votre sensibilité professionnelle pour accélérer les réformes et entreprendre des actions fortes visant à bannir toutes les pratiques de soins violentes et persistantes. »

Rappelons que de nombreuses personnes ont pris part à cette mobilisation, portant des messages invitant au respect du droit à la santé de la personne humaine au Bénin. Parmi les slogans inscrits sur les pancartes brandies, on pouvait lire :

« Les violences gynécologiques et obstétricales sont inacceptables. Exigeons des soins respectueux et humains. », « Chaque femme mérite un accouchement respectueux. », « La santé des femmes, c’est notre responsabilité à tous. », « Consentement, écoute, respect : des droits fondamentaux en gynécologie et obstétrique. », « Accoucher dans la dignité et le respect est un droit, pas un privilège. »

Megan Valère SOSSOU